Championnats d’Europe de Strzegom : Maé et Jeanne, une histoire en or
Il y a des décorations qui se méritent et puis il y a les médailles qui se gagnent. Dans le petit village polonais de Strzegom, du 11 au 15 août 2021, le mérite a marché de pair avec la gagne. Indissociables !
Revivons cette aventure avec Maé Rinaldi et Jeanne Hirel, respectivement championne d’Europe, par équipe et en individuel, en CCE et CSO.
Maé Rinaldi (Boston du Verdon)
« Tous les cavaliers rêvent d’être champion d’Europe ! Ce rêve, je l’avais aussi dans ma tête… Boston et moi nous connaissons par cœur : cela fait cinq ans que je le monte et lors de mes trois années de CCE, il a prouvé sa régularité en nous plaçant systématiquement dans les trois premiers du classement. Cette sélection était donc l’aboutissement de nos années de préparation. J’étais tellement déçue qu’en 2020 il n’y ait pas de championnat à cause de la crise sanitaire… Après les championnats de France (Maé s’y est classée 3e, ndlr), Emmanuel Quittet nous a confortés en annonçant notre équipe très performante : il croyait dur comme fer à ces médailles d’or ! Mon rêve se réalisait enfin ! J’étais impatiente de vivre cette aventure avec mes cinq coéquipiers.
Avant le dressage de Strzegom, j’étais confiante car Boston est rarement perturbé par les éléments extérieurs. Il s’est avéré extrêmement disponible et connecté à mes aides ; mes premières sensations au paddock se sont rapidement confirmées. J’ai essayé de ne pas regarder l’écran géant situé à proximité du rectangle, afin de rester concentrée, mais à la fin, c’est avec plaisir que j’ai lu la note de 76,8 %. Le cross ne m’a pas paru si compliqué, hormis la distance plus longue et la vitesse plus rapide qu’en France (520 m / min au lieu de 500 m / min). Concernant la technicité, la Tournée des As nous prépare très bien. Tous les profils d’obstacles et les types de combinaisons sont abordés en France. J’étais très confiante car Boston avait extrêmement bien couru Pompadour qui était une étape difficile. Le stress de la semaine dû à l’enjeu m’a tout de même ajouté une difficulté supplémentaire. Le cross débutait samedi à 14 heures et je passais à 17 heures. Je suis allée voir une dizaine de partants au début de l’épreuve et ai pu suivre Valentin, notre ouvreur, qui a effectué un excellent parcours dans le temps. Les cavaliers des autres nations ont rencontré beaucoup de difficultés, et du coup, au fur et à mesure de l’épreuve, ils ont pris les options lentes. Emmanuel est resté sur sa tactique de ses reconnaissances : nous devions prendre une seule option lente sur une pointe située dans une descente. Boston s’est très bien comporté, comme d’habitude. J’ai juste eu un peu peur lorsqu’il a glissé sur la dernière combinaison. Nous sortons sans fautes aux obstacles, avec 5,2 points de temps dépassé. A l’arrivée, j’étais épuisée. Je pense que j’ai mal géré la chaleur, le stress et ma respiration. Je ne me suis pas assez hydratée et, surtout, j’ai eu de fortes crampes à la main droite à partir du milieu du parcours. Cela m’a contraint à prendre deux rênes dans une main à plusieurs reprises pour tenter d’enlever la douleur. La veille du CSO, en tête après le cross en individuel et par équipes, je réalise que nous pouvons être doubles médaillés d’or. J’ai tout de même bien dormi : Boston saute très bien, cela me permet d’être plus sereine. Je me suis mise dans ma bulle avant le parcours, je crois même que le stress m’a aidée à être plus précise et plus exigeante. Le parcours s’est très bien passé, nous réalisons un sans-faute et conservons la tête par équipes et en individuel. Je n’oublierai jamais ce moment ; c’était la première fois que je pleurais de bonheur ! ».
Jeanne Hirel (Vedouz de Nestin)
« Nous avons commencé notre périple au championnat des As de Canteleu où il y avait une As Poney 1 que toute l’équipe a couru, et pour tout vous dire, nous avons eu une petite remontée de bretelles par Olivier (Bost, ndlr) lors d’une réunion dans le week-end car nous n’étions pas très concentrés et que ce n’était pas de cette manière que nous allions sortir un résultat aux championnats d’Europe ! A la suite de ce concours, nous sommes allés à Barbizon dans les écuries d’Olivier où nous avons passé une semaine. On était tous très liés et on s’entendait très bien, c’était très agréable. On a pu finir de préparer nos poneys tout en faisant des activités comme l’escape game. Olivier nous a emmenés marcher (on a d’ailleurs perdu Anna et mon frère, c’était moins drôle sur le moment !). On a mangé tout le temps ensemble, c’était un esprit d’équipe rêvé. Puis est arrivé le jour du départ pour aller jusqu’en Pologne : lorsqu’on est arrivés là-bas, on était tous très excités de commencer la compétition, mais il ne fallait surtout pas se mettre la pression ! J’ai eu la chance d’être désignée « chef d’équipe » par Olivier car j’avais déjà eu un peu expérience et il comptait sur moi pour faire comprendre à l’équipe que ramener une médaille allait être un vrai combat avec les autres nations.
Nous avons fait la warm-up et tous les poneys se sont très bien comportés, donc Olivier était déjà un peu plus rassuré. La compétition a commencé, et dès le premier jour, nos résultats comptaient pour l’équipe : nous avons réalisé 5 sans-fautes sur 5. Le lendemain avait lieu la Coupe des nations, c’était vraiment une épreuve où on avait besoin d’être tous soudés. La veille, lorsqu’Olivier devait choisir nos ordres de passages, il nous a convoqués et nous a tous demandé quel numéro on préférait pour être les plus à l’aise. En ce qui me concerne, j’ai demandé à passer en quatrième, parce que plus j’ai de pression mieux je suis. Olivier était d’accord avec tous nos choix. Le jour J, tout le monde était un peu stressé, ce qui était normal, et j’ai essayé de faire en sorte que ce stress ne nous éloigne pas les uns des autres, mais au contraire qu’il nous soude. Lors de la deuxième manche, la cavalière avant moi est tombée et j’étais encore au paddock quand je l’ai vue. Je savais que nous étions en tête mais je ne savais pas combien de points nous avions d’avance. En fait, nous avions déjà gagné, mais personne ne me l’a dit… Je suis partie sur mon tour et Vedouz m’a offert un magnifique sans-faute. Lorsque je suis sortie de la piste, j’avais un sentiment de joie inexplicable, et même maintenant en vous faisant part de tout ça, j’en ai encore des frissons. On s’est tous sautés dans les bras, tout le monde pleurait, c’est vraiment un souvenir d’une vie. Anna est venue me dire « tu sais on avait gagné avant que tu passes, mais Olivier nous a interdit de te le dire et personne n’avait encore réalisé cette performance avant ton sans-faute ! ».
Après cette victoire en équipe, on ne pouvait qu’être nostalgiques, mais il fallait qu’on se reconcentre puisqu’il nous restait l’épreuve individuelle où on avait tous une carte à jouer. Le dernier jour de compétition est arrivé et nous étions très peu de cavaliers à avoir un score vierge. Sur le premier tour, Vedouz réalise un nouveau sans-faute, mais je sentais qu’il commençait à être fatigué, cela faisait trois semaines qu’il n’était pas rentré à la maison. Nous nous sommes isolés pendant la pause et je me suis concentrée, je me suis dit que je n’étais pas loin d’une éventuelle médaille et qu’il fallait en priorité que je me fasse plaisir et ne pas me mettre une trop grosse pression et tout rater. Je suis allée voir Vedouz, malgré sa fatigue il était toujours autant motivé. Marie-Reine était, elle aussi, stressée et je lui ai dit « s’il faut que je le porte sur mes épaules pour finir ce championnat, je le ferai », alors elle a rigolé et était plus détendue à l’idée que je ne sois pas sous pression complète. Le dernier saut avant d’aller en piste, Vedouz ne l’a pas très bien effectué et Olivier a regardé mon papa avec un regard très inquiet et puis il a demandé à Marie-Reine s’il fallait refaire un autre saut, alors Marie-Reine m’a regardée et je lui ai fait un signe pour lui dire que ce n’était pas la peine… Et nous sommes partis en piste. Vedouz était parfait, puis juste avant le dernier obstacle j’ai entendu des bruits tout autour de la piste et je me suis dit que je n’avais pas le droit à l’erreur, et Vedouz m’a offert cette victoire en individuel. Je pense que je ne réalisais pas, et à vrai dire je ne m’en rends toujours pas compte ! Ces trois semaines en août on était juste inoubliables… ».