Covid-19 : Comment s’organise une écurie comme celle de Jean-Philippe Lima en période de confinement ?
Poney As : Comment s’organise ta structure en temps normal ?
Jean-Philippe Lima : Actuellement, au sein des écuries Grandjean où je suis installé depuis trois ans, j’ai onze poneys de sport concourant de la Poney 4 à l’international puis mes deux chevaux. J’ai quatre cavalières qui concourent en Grand Prix dont trois en CCIP. Habituellement, je travaille les poneys avec une cavalière à temps partiel deux fois par semaine. Les enfants ne viennent pas tous les jours ; ils habitent principalement à Paris ou ses alentours. Puis, une enseignante me remplace lorsque je suis en déplacement pour les compétitions. Mais, pendant cette période de confinement, je suis seul ! J’ai la chance d’être chez les Grandjean, qui eux, s’occupent de faire les boxes, nourrir et de sortir les chevaux au paddock ou au marcheur. Je n’ai plus qu’à me concentrer sur le travail.
J-P.L. : Je réalise plutôt un travail d’entretien et plus calme. Je fais des groupes d’équidés en fonctionnant sur trois jours et ainsi de suite. Les chevaux travaillent deux jours et ont un jour de repos tout en sachant que le matin, ils sont également au paddock ou au marcheur. Mais parmi eux, j’ai également des petits poneys sur lesquels je ne peux pas monter alors ils font plutôt de la longe ou un travail de longues rênes.
J-P.L. : Je ne pense pas que les concours leur manquent, loin de là, mais l’absence des cavaliers, si. Avec moi, ils sont tous au travail (rire !). Ils auraient été plus contents avec les enfants, je suis plus grand et plus lourd. Mais je pense plutôt qu’ils traduisent un surplus d’énergie. Nous étions à un jour de partir à la Tournée de As de Pompadour donc ils étaient tous prêts à reprendre la saison. Ce sont des poneys de Complet avec forcément beaucoup d’énergie qu’ils ne peuvent pas dépenser. En semaine, ils ont l’habitude d’aller galoper dans la forêt de Chantilly. Lorsqu’ils reviennent d’un cross, ils sont souvent fatigués. Aujourd’hui, nous devons tous rester au sein de la structure. J’ai d’ailleurs été obligé de diminuer les rations pour qu’ils soient plus calme et ne grossissent pas.
J-P.L. : Oui, c’est très compliqué. De mon côté, dès que nous pourrons reprendre la compétition, mes cavaliers pourront y aller car j’aurai travaillé les poneys. Mais si l’on regarde les structures ayant mis leur cavalerie en pâture, ça va être compliqué pour eux. Nous en sommes à un mois et peut-être deux d’arrêt du sport ce qui correspond à environ deux mois de remise en route afin que les poneys soient performants lors d’une compétition. D’ailleurs, la Fédération ne s’est pas encore prononcée pour les championnats de France mais s’ils les maintiennent, je ne vois pas comment nous pourrons présenter des couples performants sans casse. Pour revenir plus précisément à la question, cette saison était aussi synonyme de dernière année pour les cavaliers de 16 ans. Pour participer aux concours internationaux et aux championnats d’Europe, ce sont des années d’investissement : financier, de temps, de travail, d’espoir et d’objectifs. Pour eux, c’est une catastrophe. Pour les poneys, en revanche, ça les économise plutôt !
J-P.L. : Nous n’avons pas assez de recul mais honnêtement, je ne vois pas comment nous pouvons faire un regroupement de différents pays dans les mois à venir. Le championnat d’Europe est une grosse et difficile compétition qui demande de la préparation. Le passage par des concours comme Pompadour, Mâcon et les internationaux est incontournable. À moins d’avoir des poneys et cavaliers expérimentés ayant déjà participé à cette échéance, les autres couples ne seront pas prêts pour ce championnat même si c’est reporté. Il faut qu’ils passent avant par ces gros concours-là sinon ils seront très en retard dans la préparation. Puisque les Jeux Olympiques ont été reportés d’un an, ça me paraîtrait logique que les championnats le soient aussi. Tout sportif a besoin d’un entrainement pour courir de telles échéances. D’ailleurs, les poneys travaillent mais les cavaliers non. Je ne les ai pas vu depuis un mois, je ne sais pas ce qu’ils font, s’ils s’entretiennent physiquement. Pour courir le cross des championnats d’Europe, le cavalier doit aussi être physiquement prêt. Dans tous les cas, que ce soient les championnats d’Europe ou de France, s’ils sont maintenus ou reportés, il faudra baisser le niveau pour minimiser la casse.