Retour à la liste d'articles Article du 18/01/2016

Incroyable petite Reine

C’est au cours de l’été 1990 que Reine du Tinturier a véritablement pointé le bout de son nez. En frappant fort ! Avec son cavalier Yannick Houriez, ne figurant pas sur la liste des couples présélectionnés pour les championnats d’Europe de Rome, elle tape à l’œil de Roger Bost (le papa de Bosty et d’Olivier) alors entraineur national, lors des championnat de France D1 (le Grand Prix de l’époque). Le duo venait en effet de décrocher la victoire au cours des deux premières manches … C’est ainsi que Yannick et sa ponette isabelle, alors âgée de 7 ans, reçoivent leur billet pour l’Italie ! Exit donc la finale tournante et un potentiel titre pour Yannick et Reine ; Roger Bost ne préfère pas envoyer « ses » couples sur cette ultime épreuve (risquée et éprouvante) à quelques jours de l’échéance européenne.

Reine du Tinturier et Yannick Houriez, aux championnats d'Europe - ph. Coll. Houriez
Reine du Tinturier et Yannick Houriez, aux championnats d’Europe – ph. Coll. Houriez

Fort de cette expérience, le couple continue sur sa lancée. En 1991, les championnats d’Europe se tiennent aux Pays-Bas, à Wierden. Cette fois membres de l’équipe alignée pour la Coupe des nations où la France ne brille guère (7e avec 28 points, 12+16), Yannick et Reine réalisent en individuel un bel exploit, celui de décrocher la septième place. Là où le binôme néerlandais Bram Landa / Promisses a glané l’or ! Un rang très respectable qui permet à Reine du Tinturier d’entrer dans le cercle très fermé des poneys sous selle française ayant réussi à se classer dans le top 10, au même titre qu’Hibis du Bec (5e ex en 1982 et 4e en 1983 et 1984), Panama du Cassou (5e ex en 1995), Via Veneto (5e ex en 1995), Dao du Gouet (4e ex en 2000), Chaveta II (5e en 2001), Black Devil (2e en 2004), Laudanum du Terrier (10e ex en 2009), Milford de Grangues (8e ex en 2011), Jimmerdor de Florys SL (5e ex en 2012), Sligo de Mormal (6e en 2014 et 7e en 2015), Rominet de Bruz (7e en 2014), Quabar des Monceaux (7e en 2013 et champion d’Europe en 2014) et Shamrock du Gite (champion d’Europe en 2015).

Reine du Tinturier et Yannick Houriez, aux championnats d'Europe - ph. Coll. Houriez
Reine du Tinturier et Yannick Houriez, aux championnats d’Europe – ph. Coll. Houriez

Chez les Houriez, Reine habitait dans un lotissement  – avec comme installation un unique rond de longe – et allait s’entrainer 2 fois par semaine avec Yannick dans un club voisin. Montée ensuite sur de plus petites épreuves par les deux petits frères, Mickaël et Johann, la famille Houriez décide en 1993 de mettre Reine à la reproduction. Naitra en 1994 Goldy des Tordoirs puis l’année suivante Holie des Tordoirs, fils et fille de la star de l’époque, un certain étalon Connemara bai, Kilkady Darling… alors monté par Véra Benchimol à Wierden ! Holie se qualifiera pour la finale du Cycle classique de CSO à 4 ans, puis donna naissance à Nixon de la Monnaie (Linaro SL, Poet), Oliviane (Teake It Easy SL, Poet, IPO 124/13) et Beg Meil (Prinz de Quillien, Wd).

Reine du Tinturier et Yannick Houriez, aux championnats d'Europe - ph. Coll. Houriez
Reine du Tinturier et Yannick Houriez, aux championnats d’Europe – ph. Coll. Houriez

La championne fera ensuite connaissance avec la famille Schneider. « Mon père avait vu une annonce, l’année d’avant, mais Reine était bien trop cher. Le père de Yannick a rappelé un an plus tard, il avait gardé notre numéro. Nous l’avons acquise… au téléphone, à crédit, et sans l’essayer ! », explique Anthony. « Nous l’avons montée en allant la chercher. Reine avait 13 ans, j’en avais à peine 10 ».
En 1996, Reine réapparait sur les terrains avec Caroline Schneider, la grande sœur d’Anthony. Premier Grand Prix à Mulhouse et première victoire ! Antony récupère la lionne à la fin des années 90. Le couple engrange succès et classements dans de belles épreuves et notamment une onzième place aux championnats de France D1 Elite en 1998. Anthony Schneider est aujourd’hui cavalier et moniteur, tout comme sa sœur, et tient sa propre structure dans l’Aube, où Reine résidait. Quelques enfants ont même eu l’honneur de la monter.

Après sa carrière sportive, Reine est retournée à la reproduction. Mariée au Selle Français Totoche du Banney, elle a mis au monde Martinique de Vigotte en 2000, puis a continué un peu la compétition en 2002, avec Melissa Schwartz Maier (IPO de 152 en D1P) avant d’avoir son quatrième produit, Queen de Mentendal en 2004, fille de Garryhinch Millrace (vendue en Belgique). La généreuse petite Martinique (1.58 m !), petite boule de nerfs, prendra part aux Grands Prix 1,30 m, allant jusqu’en 1,45 m et au critérium des As Jeunes Séniors.

Anthonyy Schneider et Martinique de Vigotte, la fille de Reine
Anthonyy Schneider et Martinique de Vigotte, la fille de Reine

« Pour l’anecdote, Bosty est venu me voir sur le Grand Parquet lors d’une reconnaissance de championnat. Il m’a félicité de mon sans faute la veille avec Martinique et m’a donné des conseils. Je lui ai dis que c’était la fille de Reine que son père Roger avait sélectionné pour les championnats d’Europe… C’était assez incroyable ! ». Elle donnera naissance en 2013 à Dionysos de Metendal, fils d’Ibis de Courcel. Anthony a monté Reine puis sa fille Martinique, peut-être sera t-il le cavalier de Dionysos ? « Oui, j’aimerai beaucoup qu’il devienne mon cheval de tête. Dans tous les cas, j’espère qu’il sera approuvé étalon pour prolonger une fois de plus la lignée de ma ponette ».

Reine du Teinturier, née chez le vicomte Xavier de Rodez Benavent en 1983, était une fille de l’Anglo-Arabe Vulcain et de la jument Connemara Lobeline, par Dunmoran et était donc une sœur utérine de Bahia du Tinturier, performeuse en Grand Prix et CSIP (avec Isabelle Fontaneau notamment) et la propre sœur de Souris Tinturier (championnat de France D2 CSO en 1997).

La championne s’est éteinte fin novembre, à l’aube de ses 33 ans, chez Anthony. « Reine était devenue aveugle depuis 2 ans, mais restait toujours aux côtés de Martinique, qui n’aura jamais été sevrée. Reine n’a pas le profil des poneys de haut niveau d’aujourd’hui, aussi bien dans le physique que dans sa manière de sauter. Elle sautait ce qu’il fallait et se débrouillait toujours pour passer de l’autre côté en se vrillant parfois. Je me rappelle d’une photo chez les Houriez où elle sautait un mur d’1,80 m… C’était une ponette un peu peureuse au début, très gentille à s’occuper, bonne vivante. Quand je n’allais pas bien, j’allais la voir et elle me remontait toujours le moral ».

L’équipe de Poney-As partage la peine de celles et ceux qui ont côtoyé cette championne et leur fait part de ses sincères pensées.

Reine et Caroline - ph. Coll. Schneider
Reine et Caroline – ph. Coll. Schneider

 

Reine et Anthony - ph. Coll. Schneider
Reine et Anthony – ph. Coll. Schneider

Texte : Pauline Bernuchon
Photos : coll. Houriez et Schneider